Anhang 12

Föderalistische Charta (12. April 1964)

„Das zentrale Problem, meiner Meinung, unter dem Europa gegenwärtig leidet, ist das Fehlen einer klaren Vorstellung von der eigenen Zukunft. … Es ist eine klare Richtung erforderlich, damit die Menschen erkennen können, wohin die Reise geht.“ (Kemal Derviş 2005: 18)

Die Föderalistische Charta, welche wesentlich von Alexandre Marc und Robert Aron ausgearbeitet wurde, wird auf dem III. sMEF Kongress vom 10. bis 12. April 1964 in Montreux mit 262 Ja- und 6 Nein-Stimmen bei 49 Enthaltungen verabschiedet. Damals wurde dieser Kongress übrigens noch als X. Kongress des Mouvement Fédéraliste Européene (M.F.E.) geführt; eine entsprechende Aufstellung aller UEF, AEF und sMFE Kongresse ist hier zu finden.

Die Charte fédéraliste aus dem Jahr 1964 kann durchaus als Grundlage für das heutige „Europa der Regionen“-Konzept angesehen werden und gehört seit 1973 zu einem der neun Grundlagendokumente der Europäischen Föderalisten. Diese Föderalistische Charta ist auf Französisch und zusätzlich in einem deutschsprachigen „definitiven Vorschlag“ auch in den Archiven der Europäischen Union in Florenz (HAEU, UEF200) einsehbar.

La Charte fédéraliste

Depuis la fin de la dernière guerre, dans un monde qui n'a retrouvé ni son équilibre, ni sa tranquillité, il est, à travers les ruines et les survivances d'un passé malheureux, un certain nombre d'institutions et de réalisations qui s'efforcent de préparer un avenir meilleur. Empiriquement, comme à tâtons, le monde et en particulier l'Europe ont pris des initiatives pour sortir d'un libéralisme dépassé sans tomber pour autant sous un régime de dictature.

Ces germes d'avenir encore fragiles, qui procèdent d'une recherche commune aux pays restés libres, sont en particulier :

— la construction de l'Europe des Six, qui prétend instaurer, entre les nations, des relations plus stables que n'étaient les alliances et les traites d'autrefois ;

— le maintien d'une solidarité humaine entre les ex-colonies et leurs ex-métropoles, alors que sont dénoués les liens proprement politiques — solidarité qui se manifeste en particulier par des accords culturels, financiers, économiques, lesquels auraient été difficiles à imaginer naguère ;

— la creation d'organismes internationaux ou supranationaux, tendant, avec plus ou moins de succès, à disposer de pouvoirs réels, tels: l'O.N.U., l'O.T.A.N., les Communautés européennes ;

— les efforts de décentralisation qui, dans différents pays, remédient à la concentration excessive de type jacobin, tel le mouvement communaliste et régionaliste.

Depuis vingt ans, ces tentatives, surgies en ordre dispersé, et dont l'ensemble constitue la seule chance de salut pour le monde libre, n'ont cessé de se multiplier sans pour autant qu'elles soient conscientes de la pensée, implicite ou explicite, qui les anime.

Cette pensée, c'est le fédéralisme.

Les fédéralistes, décidés a developper ces différentes tentatives dont ils ont été souvent les initiateurs, mais dont ils dénoncent la timidité, résolus a faire comprendre aux opinions publiques, l’importance spirituelle et la cohérence des divers efforts entrepris, se sont réunis pour rédiger une charte qui puisse constituer la base doctrinale de l'action politique à entreprendre.

Ils pensent ainsi éclairer ce qui s'est passé depuis vingt ans, consolider ce qui existe et préparer les développements futurs pour la paix du monde et pour sa liberté.

1. - Introduction

En dépit des progrès techniques et d'un équipement matériel de plus en plus puissant, le monde contemporain, en désarroi, se heurte a des difficultés inextricables. La crise atteint tous les domaines de la vie. Les efforts tentés jusqu'ici pour la résoudre, aussi bien dans le camp « communiste » que dans celui des pays « libres », ont été vains ou insuffisants.

II faut aujourd'hui des solutions originales, conformes à la fois aux données du monde moderne et a la réalité même de l'homme et de la société : l'individualisme liberal, le collectivisme grégaire doivent être dépassés. Ces solutions neuves, à la fois rigoureuses et souples, sont les solutions fédérales.

Seules les méthodes fédérales peuvent donner naissance a des institutions qui soient en même temps respectueuses de la liberté humaine et capables de l’efficacité que réclame le siècle : des institutions offrant aux hommes, par l 'exercice de responsabilités concrètes et par la participation active aux grandes tâches collectives de notre époque, les moyens de leur plein épanouissement ; dans la sécurité et dans le mieux-être.

Une mutation de telle importance représente une révolution. Opposée notamment au système des souverainetés nationales accaparées par les Etats, système anachronique incapable de résoudre les problèmes vitaux qui se posent a l’humanité, cette révolution commande une première étape décisive : l’édification de l'Europe fédérée. Terre des hommes par excellence, notre vieux continent, qui manifeste sur de nombreux plans une nouvelle jeunesse, saura trouver dans ses traditions les sources du renouveau nécessaire pour le plus grand bien de ses habitants et du genre humain tout entier.

2. - Notre monde est en proie à une crise totale

La crise de notre temps a des causes multiples : morales, intellectuelles, sociales, politiques : mais leurs effets sont considérablement aggravés par l'inadaptation des structures, dans tous les domaines, au développement sans précédent des techniques.

En regard d’indéniables effets bénéfiques, la civilisation technicienne nous place devant de redoutables périls.

Aspects bénéfiques de l’ère technicienne.

a) Des progrès considérables ont été accomplis en matière d’énergie, de production, de distribution.

b) Dans les pays industrialisés, la peine des hommes a été réduite, le niveau de vie moyen s'est élevé et continue de s’élever fortement.

c) Partout — même dans les pays en voie de développement — l’hygiène, l'enseignement, la culture sont accessibles à des populations plus nombreuses.

d) Le développement des moyens de communication et d’échange, l’interdépendance économique et sociale rapprochent individus, peuples et continents, processus qui préfigure, au travers des pires convulsions, l’unité planétaire de l’humanité, déjà symbolisée par les débuts d'exploration de l'espace extraterrestre.

Aspects négatifs : crise totale.

a) A l’échelon de l'individu sévissent le déracinement et la déshumanisation. Arraché a ses cadres naturels de vie et de pensée, en proie à la foule et à la machine, l'homme « massifié », prolétarise, est en train de s'asservir a ses propres créations. La menace, insidieuse et multiforme, atteint l 'homme dans son travail comme dans ses loisirs, le producteur comme le consommateur. L'individu désarmé est livré sans défense a la domination des techniques, à la dictature des monopoles, à l'anonymat de la bureaucratie, aux excès de la publicité et de la propagande. En conséquence, des minorités, souvent occultes, exercent un pouvoir incontrôlable et incontrôlé. Toutes les classes, tous les peuples, tous les continents sont frappés ; la démocratie est en passe de devenir un mot vide de tout contenu.

b) A l’échelon des nations. C'est partout la centralisation, la sclérose des institutions représentatives, la dégradation de la vie civique, avec, au terme, l’étatisme totalitaire.

En quelques décennies, l'Etat s'est métamorphosé.

II prétendait jadis n’être qu'un arbitre : le voici devenu maître de tous les secteurs de la vie économique sociale, culturelle. Tout dépend de lui, rien ne peu se faire sans lui : individus, familles, associations, communes, départements, régions, syndicats, entreprises, professions, écoles, universités — personne ne peut agir sans son aide, son autorisation, son ordre. Les corps dits intermédiaires ainsi broyés ou assujettis, la société de plus en plus pulvérisée, « atomisée », personnes et groupes sont livres sans recours au plus froid des monstres froids, l'Etat contemporain.

Dans la mesure où ils subsistent, les partis politiques sont impuissants à se saisir des problèmes que pose une telle évolution. Ayant perdu le contact avec les masses qu’ils prétendent représenter, comme avec les données de l'histoire, ils ne sont plus ni interprètes du peuple, ni garants et protecteurs des individus ou des collectivités. Devenus des mécanismes centralises, manipules par un appareil dirigeant qui n’engrène plus sur le réel, ils se révèlent incapables de rénover démocratiquement l’ordre social ; ils ne peuvent que tenter de survivre, au pouvoir ou dans ses antichambres.

Le syndicalisme lui-même n’échappe pas à ce processus de dégénérescence et d’insertion dans le désordre établi. Pour que les syndicats ne subissent pas le même destin que les partis, un effort d’imagination, de renouvellement, de création, est devenu nécessaire.

Quant au parlement, le caractère de plus en plus technique des tâches gouvernementales, ainsi que la concentration excessive des attributions au niveau du pouvoir central, le rendent inapte à exercer effectivement son double rôle de législation et de contrôle. Elaborées dans les bureaux ministériels, les lois sont des compromis médiocres entre l'arbitraire du pouvoir, la routine administrative, l'abstraction des technocrates, les influences contradictoires des groupes de pression. Partout dans le monde, la démocratie classique manifeste sa faiblesse en reculant, non seulement devant un pouvoir de plus en plus personnalise, mais aussi et surtout devant la prétention de l'Etat, centralisateur et « massificateur », à la toute puissance.

c) A l’échelon international se déchaîne l'anarchie des souverainetés nationales, d'autant plus dangereuses qu'elles se révèlent illusoires, avec leur cortège de rivalités, de luttes sournoises, de menaces, de désordres, de conflits déclarés ou latents. Chaque Etat s'efforce de défendre, voire d’étendre l'empire de sa prétendue souveraineté au détriment des autres et sans souci du bien commun de l’humanité. A l'instar des pays occidentaux, les nations nouvellement indépendantes se lancent dans le nationalisme le plus anachronique, qui les expose aux convoitises du néo-colonialisme, occidental ou soviétique. Les déboires et les incohérences de l’O.N.U. — simple juxtaposition, faussement égalitaire, d’égoïmes nationaux — fournissent une preuve permanente de ce déplorable état de fait. Les puissances nucléaires, dont le nombre ne peut que s’accroître en vertu même de l'anarchie des souverainetés nationales, s'engagent dans la vole d'une réciproque terreur atomique.

D'immenses ressources sont englouties dans des armements insensés, alors que plus de deux tiers de l’humanité souffrent de la faim, de la misère, de la maladie, et que d'enormes stocks de vivres attendent vainement des consommateurs.

Les plus lucides parmi les hommes appréhendent le pire : ils s’aperçoivent que le prétendu sens de l'histoire n'est pas nécessairement bénéfique, que l’humanité ne progresse pas automatiquement vers un mieux, et que, malgré toutes ses conquêtes. matérielles, artistiques, spirituelles, elle pourrait un jour disparaître de la face du globe. Le sentiment de l'absurde, d'un « à quoi bon » désespéré, n'est plus réservé à quelques littérateurs pessimistes, il commence d'atteindre l'homme de la rue.

A une crise totale, il faut une réponse totale: celle du fédéralisme.

3. - Le message du fédéralisme

1° Le fédéralisme est un humanisme. II tient l'homme réel pour l'origine, le moteur et le but de toutes les activités, l’être humain n'est pas seulement un individu objet des statistiques ; c'est une personne concrète, libre et responsable, à la fois chair et esprit, pensée et action, être et devenir, dont il faut respecter toutes les richesses.

2° Respecter la personne postule qu'on reconnaisse et qu'on protège toutes les communautés legitimes — naturelles, historiques ou volontaires — auxquelles elle appartient et sans lesquelles elle ne saurait ni s’épanouir, ni même vivre. A la différence des systèmes jacobins — « démocratiques » ou « communistes » — qui ne considèrent le peuple que dans sa totalité, agrégat d'individus semblables, réduits au commun dénominateur de la nation ou de la classe, tous soumis à un Etat forcément unitaire, le fédéralisme est pluraliste. Constatant que la Société est faite d'un ensemble complexe et diversifié de groupes de taute nature et de taute dimension, la plupart préexistant a l'Etat et ayant, en taut état de cause, des droits supérieurs aux siens, le fédéralisme leur garantit le maximum d'autonomie compatible avec l’unité et la solidarité de l'ensemble, et les fait participer organiquement à la détermination et à la gestion de l’intérêt général. Au sens propre du terme le fédéralisme est donc libertaire.

3° A tous les étages de la société, nationale et internationale, le fédéralisme conjugue la compétence, l'autonomie et la responsabilité, de manière que le courant social devienne ascendant et que la société s’édifie principalement de bas en haut, à partir des communautés de vie quotidienne, grâce à des délégations de pouvoir successives. Aucune autorité « supérieure » n'intervient dans la sphère d'action d'une autorité « inférieure » tant que celle-ci reste efficace, car le fédéralisme applique le principe de subsidiarité.

Interdisant ainsi taute concentration inutile, limitant le pouvoir en multipliant les pouvoirs, le fédéralisme représente une garantie permanente contre l'oppression, oppose une barrière infranchissable à tous les totalitarismes, permet l'exercice d'une démocratie réelle, parce que conçu à la mesure de l'homme. Dotant chaque organe des pouvoirs correspondants à l'exercice de sa fonction, il supprime tout problème de minorité. Il ne nie pas plus les tensions sociales qu'il ne les écrase sous l'arbitraire; il les féconde par la confrontation entre ces éléments complémentaires que sont l'individu et le groupe, l’unité et la diversité, la liberté et la solidarité, dialogue libre et permanent, conduit saus le seul arbitrage du droit. C'est pourquoi le règne du droit est synonyme du fédéralisme.

4° Assurant à chaque collectivité la plénitude des compétences et des pouvoirs qu'elle est capable d'exercer, le fédéralisme empêche que des décisions soient prises sans l'avis et le concours de ceux auxquels elles s'appliquent. La recherche et l'organisation d'une meilleure justice sociale exigent que soient mis en oeuvre en même temps que les trois autres principes : autonomie, coopération, subsidiarité, qui caractérisent, le quatrième principe fondamental, celui de participation.

Sur la base de ces principes, le fédéralisme propose un ensemble complet d'institutions originales, conforme à la fois aux aspirations de l'homme, à la nature des choses et aux impératifs de notre temps.

4. - Les institutions politiques et économiques

1° Dans la société fédérale, toutes les collectivités naturelles ou volontaires sont autonomes. Elles se donnent elles-mêmes leur statut et leur organisation, décident librement de leurs affaires, se dotent des organes et disposent — directement ou par voie de péréquation - des ressources propres nécessaires à l’exécution de leurs décisions. Celles-ci ne sont soumises à aucune tutelle ou autorisation préalable : elles relevant seulement du contrôle juridictionnel de leur conformité à la constitution et à la loi fédérale.

II n'est donc pas de société fédérale sans autonomie des collectivités territoriales, d'une part — communes, groupements intercommunaux, provinces, régions, groupes et rassemblements ethniques, etc. — et d'autre part de toutes autres collectivités, économiques, sociales, culturelles, spirituelles. C'est l'articulation ascendante et le libre déploiement de ces collectivités et communautés qui définissent le fédéralisme authentique.

2° Collectivités territoriales et groupes sociaux se fédèrent en communautés plus larges pour gérer ensemble leurs affaires communes. En outre, des communautés de même niveau ou de niveaux différents peuvent librement s'associer pour gérer des intérêts complémentaires. Dans les deux cas, chaque groupe contractant est représente au sein de l'organe commun.

Le fonctionnement régulier des institutions fédérales est assuré par le caractère complémentaire et le contrôle réciproque des communautés. Des institutions arbitrales tranchent les conflits éventuels d'attribution ; dans le doute — et antérieurement à la procédure d'arbitrage obligatoire — la compétence est toujours acquise à la communauté « subordonnée », ou, plus exactement, la plus proche de l'homme.

3° L’économie fédérale est orientée.

Elle récuse également le libéralisme anarchique et le despotisme planificateur. Elle se fonde sur l'articulation fédérative des entreprises et des professions, concourant avec les pouvoirs locaux, régionaux, nationaux, fédéraux, à la formulation et à l’exécution d'un plan dont l'objectif majeur est défini par les deux dimensions complémentaires du minimum vital et de l'optimum social. Respectueuse de la libre initiative des individus et des groupes, I’économie fédérale s'ordonne aux divers échelons par le moyen de conseils économiques et sociaux où sont représentés, d'une manière équilibrée et juste, les travailleurs de toutes catégories et les consommateurs. Elle réalise ainsi une démocratie économique décentralisée qui, assurant a la fois, la stabilité et l'expansion, libère l'homme de la tyrannie de l'argent et de l'oppression du capitalisme d'Etat.

a) La propriété.

Le droit a la propriété est inaliénable : son exercice est un privilège de la personne qui contribue à l 'accomplissement de l’être humain.

Le fédéralisme tend a généraliser la propriété en y faisant accéder les non-possédants : à la purifier en supprimant les rentes de rareté et les profits non justifiés par un service rendu : à la différencier en propriété privée et en propriété sociale, sous toutes les formes : familiale, communale, coopérative, syndicale, régionale, mixte, etc. Toute propriété inexploitée ou exploitée au détriment du bien commun peut, par décision de justice, être confisquée et attribuée à de nouveaux détenteurs, sous réserve de justes indemnisations.

Prolongement de la personne, la propriété — dès qu'elle dépasse la taille de l'homme — doit se plier aux règles que dictent le bien commun, l'ordre public et les exigences de l’économie orientée. Ainsi la propriété cessera d’être un moyen d'exploitation, et, partant, un pouvoir d'oppression d'autant plus redoutable qu'il reste habituellement occulte ou camouflé.

b) l'entreprise.

L'entreprise est une communauté de travail qui, du directeur au manoeuvre, associe des personnes libres et responsables, dans le double but :

— de fournir à la société, au meilleur prix, un produit ou un service de qualité ;

— d'assurer à tous ses membres une rémunération correspondant à leur participation à la tâche commune.

Dans toute la mesure du possible, l'entreprise est organisée en équipes et ateliers autonomes, ayant entre eux et avec la direction des rapports d'association de type mutuelliste. Ainsi, par la disparition de la condition salariale, peuvent être menées a bien l’émancipation réelle des travailleurs et leur accession à toutes les formes de responsabilités.

c) Le syndicat.

Articulés et fédérés géographiquement, professionnellement et interprofessionnellement, les syndicats de toutes catégories se constituent librement et chaque travailleur adhère à celui de son choix. Leur rôle consiste :

— à défendre les intérêts matériels et moraux de leurs membres ;

— à participer a la gestion des entreprises, des groupes d'entreprises, des branches et groupes professionnels et interprofessionnels, etc., sans porter atteinte pour autant à leur autonomie ;

— à coopérer, aux différents niveaux, a l’établissement du Plan et au contrôle de son exécution.

Les syndicats et groupements professionnels sont organiquement représentés au sein des Conseils économiques régionaux et du Conseil économique fédéral.

d) La planification.

L’économie comporte deux secteurs : le secteur planifié et le secteur libre, qui ne sont ni immuables ni isolés l'un de l'autre. Cette dualité permet de concilier les avantages de la concurrence, ceux de la chances d'une expansion maximale et celles d'une prévision a long ou moyen terme et ceux de l'orientation rationnelle de l’économie, et de conjuguer les grande stabilité.

Le Plan est décentralisé dans son élaboration et son exécution. II est élaboré dans un dialogue vivant entre le sommet et la base de la société fédérale. Par l'entremise d'organismes locaux et régionaux, la base fait connaître les besoins fondamentaux (alimentation, vêtement, habitation, éducation, santé) dont le Plan doit assurer la satisfaction en priorité. Le sommet recense, coordonne, équilibre les données ainsi recueillies, et les met en forme, mais en outre assume également la responsabilité d'une veritable prospective, c’est-à-dire d'une politique d'ensemble. Chaque échelon de la société conserve de la sorte, la possibilité de faire connaître ses besoins et de faire valoir ses vues, sans aliéner son autonomie ni porter atteinte à l’efficacité de la planification globale. II en va de même pour l’exécution du Plan lequel est ainsi contrôlé démocratiquement d'en bas et techniquement d'en haut.

e) Le crédit.

Dans une économie en expansion, comme celle de notre temps, le crédit — base de la monnaie, clé des investissements — joue un rôle fondamental. Pour ne pas devenir à son tour un moyen de centralisation, il faut qu’il soit adapté aux structures décentralisées et déconcentrées de la société fédérale.

A long terme, il a pour but d'orienter — en conformité avec le Plan — les grands travaux, l’aménagement du territoire, l'expansion regionale, l'urbanisme, les investissements sociaux. A court terme, il équilibre la production, la consommation et les échanges extérieurs.

Seule une organisation fédérale — c’est-à-dire décentralisée et spécialisée — du crédit permet d’échapper au cycle infernal d'inflations et de récessions.

f) Le progrès social.

Le progrès social a pour objectifs essentiels :

— d'assurer à tous les hommes la satisfaction de leurs besoins fondamentaux ;

— de réduire a son minimum incompressible la part de besogne indifférenciée exigée par l'organisation du travail ;

— de faire assumer cette part résiduelle, par exemple sous la forme d'un service civil, non plus par une seule catégorie sociale pratiquement réduite a l'esclavage, mais par le corps social tout entier ;

— d’associer les travailleurs, à tous les échelons, aux initiatives, responsabilités et résultats de la vie économique, qu'il s'agisse de l'industrie, de l'agriculture ou du secteur tertiaire ;

— d’organiser la distribution et la consommation de manière à satisfaire, en même temps que les lois de l’efficacité économique, les exigences de la dignité humaine, en luttant contre les excès de la concurrence, de la publicité, du productivisme aveugle, de l’économie du gas pillage et de la technocratie, étatique ou privée ;

— de créer des institutions, universitaires, économiques, sociales, permettant à chacun de répondre du mieux possible à sa vocation et à tous de s’élever dans l’échelle humaine, de participer effectivement à la gestion de la société et d'assurer par la « promotion » et par la mobilité sociales, le renouvellement démocratique des cadres.

Ainsi, par la création d'institutions étagées et la mise en oeuvre de l'ensemble des mesures qu’il préconise, le fédéralisme combat effectivement le déracinement, la « massification », la prolétarisation et l'angoisse de l'homme contemporain. ll établit un ordre social fondé sur la liberté et la justice, et tel que le sens de l'effort et des responsabilités, la culture, les loisirs ne soient plus l'apanage d'un petit nombre mais deviennent accessibles à tous, dans une émulation féconde, antithèse et antidote du nivellement généralisé qui menace la civilisation de notre temps.

5. - La Fédération européenne

Esquisse de l'Europe.

a) La Fédération européenne assumera la responsabilité de la défense, de la diplomatie, du commerce extérieur, de la monnaie et de la coordination générale en matière économique et sociale, toutes fonctions que les Etats isolés ne sont plus en mesure de remplir efficacement.

b) La Constitution, fondée sur l'adhésion libre et solennelle des fédérés, aura pour assise une Charte des droits de l'homme et des communautés, garantie par une Cour suprême à laquelle pourra en appeler toute personne physique ou morale. Elle déterminera les attributions des autorités fédérales, consacrera les libertés individuelles et collectives, ainsi que les autonomies nationales, ethniques et culturelles.

c) La Fédération européenne aura ses propres institutions lesquelles disposeront des ressources directes nécessaires et d'un pouvoir indépendant de décision comprenant notamment :

— un gouvernement fédéral ;

— des assemblées représentant les citoyens et les diverses communautés territoriales ;

— des conseils économiques et sociaux dotés des pouvoirs réels ;

— des tribunaux d'arbitrage habilités à trancher des conflits de compétence à tous les échelons, et couronnés par un Conseil ou une Cour suprême.

d) La Fédération européenne sera ouverte à tout peuple européen qui s'engagera a respecter la Charte des droits et qui acceptera la Constitution fédérale.

e) La Fédération européenne est une étape sur le chemin de la Fédération mondiale, objectif final de tous les fédéralistes.

Mission de l'Europe.

Par sa contribution décisive au camp de la liberté la Fédération européenne renforcera la position de l'Occident et diminuera ainsi les risques de conflit armé.

Libérée de toute servitude à l’égard des Etats-Unis, la Fédération européenne établira dans l’égalité, sur une saine base de communauté de civilisation, d’intérêt et d'aspirations, les rapports de coopération organique entre les peuples d'Europe et d’Amérique.

Foyer de rayonnement et pole d'attraction, la Fédération européenne suscitera un grand espoir chez les peuples asservis de l'Est. Elle déclenchera un double processus : de libéralisation de la société totalitaire, de libération des « marches » de l'Empire soviétique.

Respectant l’indépendance des jeunes Etats, la Fédération européenne permettra de mieux coordonner l'aide des pays industrialisés aux pays en voie de développement.

Dans l'esprit d'une libre coopération, elle maintiendra et développera les liens économiques et culturels de l'Europe avec le « tiers monde », plus particulièrement avec l'Afrique. Prêchant d'exemple, elle facilitera le dépassement du nationalisme et l'accession volontaire à tous les degrés, à toutes les formes de l'association fédérale.

Aménageant harmonieusement le territoire européen :

— décentralisant au bénéfice des communautés de base et des collectivités ;

— multipliant les pôles d'expansion ;

— intensifiant les échanges intérieurs et extérieurs ;

— instituant une èconomie du don pour respecter, sans considération du profit, les nécessités vitales ;

— disposant d'organes assurant une croissance économique, équilibrée et juste, dont une Banque d'investissement et un Fonds de réserve fédéraux.

La Fédération européenne portera à un degré jamais atteint le volume de la production et le niveau de vie, non seulement matériel, mais aussi culturel, des Européens, et, par le renouvellement radical des structures et des institutions, leur ouvrira l’accès à une démocratie veritable, politique, économique et sociale.

Ainsi, grâce à la restauration, sur tous les plans, de la dignité de la personne et à l'instauration d'un ordre fonde sur la liberté et la justice, la Fédération européenne contribuera à susciter et à diffuser dans le monde un nouvel humanisme, à la mesure des possibilités immenses que les sciences et les techniques modernes offrent à tous les peuples de la Terre.

6. - Les objectifs stratégiques

Pour s'incarner dans les faits, le fédéralisme doit définir avec netteté et précision ses objectifs stratégiques.

L'Etat national, en vertu de ses prétentions à la souveraineté absolue, est à la fois cadre d'existence et soutien de toutes les structures sclérosées ; il incarne les forces conservatrices qui s'opposent a l'avènement de la démocratie fédérale.

En conséquence, il appartient aux fédéralistes de démembrer l 'entité statonationale.

Ce démembrement doit s'effectuer dans deux sens opposés : d'une part vers le haut, par la création d'une Fédération européenne ; d'autre part vers le bas, par la suppression de tous les privilèges injustifiés et par la fédéralisation radicale de toutes les structures.

2° Pour commencer, l'offensive doit se concentrer sur le front européen où l'affaiblissement des structures traditionnelles a déjà permis d’ébranler la souveraineté des Etats.

La véritable révolution fédéraliste doit s'accomplir selon le principe démocratique : « l'Europe du peuple par le peuple et pour le peuple ».

L’Assemblée constituante européenne doit devenir le point de ralliement et le centre de rassemblement des fédéralistes de tous les pays.

3° Les fédéralistes, conscients de représenter l 'avant-garde du peuple européen, se constituent en Force Politique unifiée sur la base de la présente Charte afin d'engager les peuples d'Europe dans le combat sans rémission pour la chute définitive des souverainetés étatiques.

Dans ce but:

a) Ils continueront de soutenir avec énergie les Communautés Européennes dans leur effort de résistance aux tentatives d'emprise des Etats nationaux et dans leur aspiration à l'Europe fédérée.
b) Ils lancent un appel à toutes les forces progressistes qui luttent pour le même ideal de dignité humaine, de justice et de paix ; ils s'adressent à toutes les communautés vivantes : communes, syndicats, jeunesses ouvrière et agricole, universités et étudiants, etc.

c) Afin de dégager la volonté du Peuple européen et d'affirmer sa résolution, ils invitent ces forces à participer à la bataille pour la Fédération sous toutes ses formes, notamment :

— par le recrutement intensif de membres nombreux et représentatifs dans les rangs du M.F.E. ;

— par des referendums ou élections libres, dites « primaires », comme celles que le Congrès du Peuple Européen mène depuis plusieurs années ;

— par l’élaboration, dans le respect de la présente Charte des Cahiers de revendications;

— enfin, en soulignant vigoureusement et à taute occasion, dans les campagnes de presse ou autrement, l 'impasse à laquelle aboutissent infailliblement les conférences intergouvernementales européennes en l'absence d'un pouvoir fédéral.

Les Fédéralistes, aile marchante de la révolution humaniste, profondément convaincus de la justesse de leur cause, affirment leur résolution d'emporter la victoire.

Par cette victoire, l'homme déprolétarisé, rendu à la liberté, au sens de sa responsabilité, au plein exercice de ses facultés créatrices, redeviendra citoyen conscient d'une cité fraternelle, maître de sa destinée.


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